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Psychédélique(s) étudié(s) : Psilocybine
Publiée le 5 décembre 2025
Type : Etude expérimentale
Auteurs : Quan Jiang, Ling-Xiao Shao, Shenqin Yao, Neil K. Savalia, Amelia D. Gilbert, Pasha A. Davoudian, Jack D. Nothnagel, Guilian Tian, Tin Shing Hung, Hei Ming Lai, Kevin T. Beier, Hongkui Zeng, Alex C. Kwan
Résumé :

L’étude examine comment la psilocybine, une substance prometteuse pour le traitement des maladies mentales, modifie la structure du cerveau. Une seule dose de psilocybine induit un remodelage des épines dendritiques dans le cortex frontal médian chez la souris. Cependant, les sources des neurones présynaptiques qui innervent ces nouvelles épines restent inconnues.

En utilisant une technique de traçage monosynaptique par le virus de la rage, les auteurs cartographient la distribution, à l’échelle du cerveau, des afférences neuronales vers les neurones pyramidaux du cortex frontal. Les résultats montrent que l’effet de la psilocybine sur la connectivité est spécifique à certains réseaux neuronaux. D’une part, elle renforce le routage des signaux provenant des régions perceptuelles et médiales (homologues du réseau du mode par défaut) vers des cibles sous-corticales. D’autre part, elle affaiblit les connexions qui font partie des boucles récurrentes cortico-corticales.

Cette réorganisation synaptique dépend de l’activité neuronale évoquée par la substance elle-même. En effet, le silençage d’une région présynaptique pendant l’administration de psilocybine perturbe cette réorganisation. Collectivement, ces résultats révèlent l’impact de la psilocybine sur la connectivité des réseaux corticaux à grande échelle et suggèrent que la modulation de l’activité neuronale pourrait être une approche pour sculpter la plasticité induite par les substances psychédéliques.

Objectif :

L’étude vise principalement à identifier les sources neuronales présynaptiques qui forment de nouvelles connexions avec les neurones pyramidaux du cortex frontal médian chez la souris après l’administration de psilocybine. L’objectif est de cartographier la réorganisation de la connectivité à l’échelle du cerveau pour comprendre quels circuits neuronaux spécifiques sont modifiés.

Un objectif secondaire est de déterminer si cette plasticité neuronale est dépendante de l’activité de décharge des neurones. L’étude cherche à prouver que l’activité neuronale au moment de l’exposition à la substance joue un rôle causal dans le schéma de la réorganisation synaptique.

Méthodologie :
  • Participants : L’étude est menée sur des souris transgéniques (lignées Fezf2-2A-CreER et PlexinD1-2A-CreER) permettant de cibler spécifiquement les sous-types de neurones pyramidaux.
  • Technique principale : Le traçage viral monosynaptique à l’aide d’un virus de la rage modifié est utilisé pour cartographier les connexions présynaptiques à l’échelle du cerveau entier vers les neurones du cortex frontal.
  • Imagerie : La microscopie à feuille de lumière est employée pour l’imagerie du cerveau entier et la détection automatisée des neurones marqués. L’imagerie biphotonique longitudinale in vivo est également utilisée pour suivre les changements des boutons axonaux.
  • Interventions : Les souris reçoivent une injection intrapéritonéale de psilocybine (1 mg/kg) ou une solution saline comme contrôle.
  • Manipulation neuronale : Une approche chimiogénétique est utilisée pour réduire l’activité neuronale dans une région présynaptique spécifique (le cortex rétrosplénial) afin de tester l’hypothèse de la dépendance à l’activité.
  • Analyses fonctionnelles : Des enregistrements électrophysiologiques in vivo (avec des sondes Neuropixels) et sur tranches de cerveau sont réalisés pour mesurer les changements dans l’activité de décharge et la transmission synaptique.
Résultats principaux :
  • Réorganisation spécifique : La psilocybine réorganise la connectivité cérébrale de manière hautement spécifique, qui dépend à la fois du réseau neuronal et du type de cellule pyramidale (tractus pyramidal – PT vs intratélencéphalique – IT).
  • Effets opposés sur les neurones PT et IT : Pour les neurones PT, la psilocybine renforce les afférences des réseaux sensorimoteurs, visuels-auditifs et médiaux, tout en affaiblissant celles du réseau latéral et du cortex préfrontal ventromédian. Un schéma de réorganisation inverse est observé pour les neurones IT.
  • Renforcement des voies sensorielles : La psilocybine augmente la densité des boutons axonaux et potentialise la transmission synaptique excitatrice provenant du cortex rétrosplénial (RSP) vers les neurones PT du cortex frontal.
  • Rôle de l’activité neuronale : La réorganisation des connexions est liée au schéma d’activation neuronale (mesuré par l’expression de c-Fos) induit par la psilocybine. La psilocybine augmente sélectivement l’activité de décharge des neurones du RSP qui projettent vers le cortex frontal.
  • Confirmation causale : Le silençage chimiogénétique de l’activité neuronale dans le RSP pendant l’administration de psilocybine annule le renforcement des connexions de cette région, confirmant que la plasticité synaptique induite est dépendante de l’activité.
Implications cliniques :

Cette étude démontre que la psilocybine ne modifie pas la connectivité cérébrale de manière aléatoire, mais induit une réorganisation ciblée et structurée des réseaux corticaux. Les résultats suggèrent que la psilocybine favorise un état cérébral où le traitement des informations sensorielles et externes est renforcé (via les neurones PT), au détriment des boucles de traitement récurrentes et internes (via les neurones IT).

L’implication la plus significative est la découverte que cette plasticité neuronale est dépendante de l’activité. Cela signifie que l’état de l’activité cérébrale au moment de la prise de la substance influence la manière dont le cerveau se réorganise. Cette découverte ouvre une voie prometteuse pour la recherche future, suggérant que des techniques de neuromodulation (comme la stimulation magnétique transcrânienne chez l’humain) pourraient être combinées avec les thérapies psychédéliques pour diriger ou ‘sculpter’ la plasticité neuronale vers des circuits spécifiques, optimisant ainsi les résultats thérapeutiques.

La synthèse de cette publication académique peut présenter des erreurs. Envisagez de vérifier ses informations en consultant la publication complète.

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